Divulgation d’un suicide : la Cour supérieure confirme l’utilité de la déclaration du vendeur

Le 21 novembre 2013, la Cour supérieure a déterminé, dans le jugement Fortin c. Mercier(1), que le vendeur d’un immeuble avait l’obligation d’informer les acheteurs qu’une mort violente y était survenue.

Les faits du dossier se résument ainsi : en février 2011, le défendeur Mercier (le vendeur) acquiert un immeuble d’une succession. Après l’avoir entièrement rénové, il le remet en vente. Il confie un contrat de courtage à un courtier immobilier.

Lorsque le courtier apprend qu’un double suicide est survenu dans l’immeuble, il avise le vendeur de son obligation déontologique de divulguer cette information aux acheteurs en utilisant le formulaire Déclarations du vendeur. À la suite du refus du vendeur d’effectuer la divulgation, les parties mettent fin au contrat de courtage.

Le vendeur confie alors un contrat de courtage à un second courtier. Suivant les informations données par le vendeur, la mention suivante est indiquée au formulaire Déclarations du vendeur : « les propriétaires se sont suicidés dans le garage ». Les acheteurs intéressés à l’immeuble sont tous refroidis lorsqu’ils sont informés du tragique événement. À l’expiration du contrat de courtage, l’immeuble n’ayant toujours pas été vendu, le vendeur décide d’afficher son immeuble sur le site Internet de l’entreprise Duproprio.

Un couple de jeunes acheteurs s’intéressent à l’immeuble. En aucun temps le vendeur ne les informe des morts violentes qui y sont survenues. C’est finalement un voisin qui, quelques jours après que le couple ait acquis l’immeuble, leur apprend le drame. Compte tenu de cette information, les acheteurs n’habiteront jamais la propriété et entreprendront un recours contre le vendeur.

La Cour supérieure affirme dans son jugement que le vendeur aurait dû informer les acheteurs du double suicide puisque cet élément « est de nature à influencer une transaction immobilière »(2) et « doit être dévoilé afin que le consentement du cocontractant soit libre et éclairé »(3). De plus, la Cour conclut que le vendeur n’a que peu de crédibilité à l’égard de l’ampleur des travaux qu’il prétend avoir effectués. Quant aux promesses d’achat sous condition que le vendeur indiquait détenir, la Cour remarque qu’il n’en fait pas la preuve et que celle relative à une expropriation avait été abandonnée avant la fin du contrat de courtage du deuxième courtier.

En conséquence, le tribunal prononce la nullité de la vente et accorde aux acheteurs des dommages.

Cette décision démontre bien l’utilité du formulaire Déclarations du vendeur ainsi que la pertinence de l’obligation déontologique pour les courtiers immobiliers de divulguer toute information de nature à influencer une transaction. Le tribunal souligne que la question au formulaire portant sur l’existence de suicide ou de mort violente est devenue obligatoire dans le domaine du courtage immobilier. « Ceci se fonde sur la nature humaine et l’expérience de ces gens de métier ».

Le jugement met également en relief la qualité du travail accompli par les courtiers immobiliers dans cette affaire et illustre les avantages de transiger par l’entremise d’un courtier immobilier.

Pour plus d'information, nous vous invitons à lire l’article suivant : L’obligation de divulgation du courtier : une protection de plus.

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(1) 2013 CanLII 5890 (QC CS)
(2) Id., par. 61
(3) Id., par. 65

Dernière mise à jour : 26 août 2019
Numéro d'article : 124067